Les supporters ont des droits. Et même le préfet doit être en mesure de prouver la matérialité des faits qu’il invoque pour prononcer une interdiction de stade. C’est ce qu’a rappelé lé tribunal administratif de Nîmes. Dans cette affaire, le préfet avait pris un arrêté en application de l’article L. 332-16 du code du sport interdisant au supporter, de pénétrer ou de se rendre aux abords d’une enceinte où se déroule une manifestation sportive de l’équipe de football de Nîmes Olympique, de l’équipe de France de football, de la fédération française de football et des équipes françaises de football se rendant à l’étranger. Il devait en outre pointer à la gendarmerie à chaque rencontre de l’équipe de Nîmes Olympique.
Le juge rappelle le régime juridique des interdictions de stade fixé à l’article L. 332-16 du code du sport qui peut dans certains cas « prononcer à son encontre une mesure d’interdiction de pénétrer ou de se rendre aux abords des enceintes où de telles manifestations se déroulent ou sont retransmises en public », notamment si la personne constitue une menace à l’ordre public.
Dans cette affaire, le préfet reprochait l’usage de deux fumigènes au cours d’un match, ce qui était contesté en défense.
Le juge considère effectivement que les faits ne sont pas établis :
- l’individu a été appréhendé en fin de partie par des agents de sécurité privée présents au cours de la rencontre et remis aux forces de l’ordre, qui ont contrôlé son identité. Ce n’est donc pas la police elle même qui a constaté les faits
- Aucune procédure de police n’a été jointe à ce rapport, qui repose uniquement sur l’attestation du gérant d’une société de sécurité privée, qui ne détermine ni la date, le lieu du match dont il est question, ni les équipes en présence au cours de ce match, ni encore le nom de l’individu interpellé
- La seule image de vidéosurveillance versée aux débats est une photographie de M. C assis en tribune, qui ne démontre aucunement les faits qui lui sont reprochés.
Le juge conclut:
« dans ces conditions et en l’absence d’éléments probants, notamment d’images de vidéosurveillance ayant enregistré les faits, de témoignages directs et circonstanciés des faits relatés et du procès-verbal de police qui a nécessairement été établi lors de la remise de l’intéressé par les stadiers aux fonctionnaires de police, alors que la charge de la preuve de la commission des faits repose sur la préfète du Gard, M. C est fondé à soutenir que leur matérialité n’est pas établie.
L’interdiction de stade est donc annulée.
Décision commentée: Tribunal administratif de Nîmes, 3ème chambre, 9 novembre 2022, n° 2003225
Voir également sur des interdictions de stade annulées: TA Cergy-Pontoise, 18 janv. 2023, n° 2300014. ; TA Dijon, 14 avr. 2023, n° 2300987. TA Versailles, 12 avr. 2023, n° 2301968. TA Lille, 9 févr. 2012, n° 1106135 (faits peu graves) ; TA Lille, 26 mars 2013, n° 1206281 (absence de délégation de signature) ; TA Cergy-Pontoise, 22 sept. 2011, n° 1002759 (incertitude sur l’auteur des faits reprochés) ; TA Bastia, 17 nov. 2016, n° 1500216 (vice de procédure pour absence de contradictoire) ; TA Nîmes, 19 sept. 2013, n° 1200131 ; TA Melun, 9 janv. 2015, n° 1403597 ; TA Lyon, 15 juin 2016, n° 1308488. (faits ou participation de l’intéressé non établis) ; TA Paris, 17 avr. 2012, n° 1015192 ; TA Paris, 25 avr. 2014, n° 1220273 ; TA Montpellier, 28 sept. 2010, n° 1001727 ; TA Versailles, 7 févr. 2023, n° 2300523.