Le tribunal administratif de Strasbourg a rendu une décision intéressante en matière de responsabilité de l’administration suite à un accident survenu dans un établissement scolaire ou à ses abords. Aux termes de ce jugement, cette responsabilité s’applique non seulement à l’égard élèves mais aussi – même si c’est plus rares – aux parents d’élèves y compris à l’extérieur de l’établissement.
Dans cette affaire, une parent d’élève était sortie récupérer son enfant à la sortie du collège et le portail de l’établissement était tombé sur elle. Le juge administratif retient la responsabilité du département – compétent pour la gestion des collèges – aux termes d’un raisonnement qui reprend le régime applicable aux dommages causés par des ouvrages publics.
La première question est celle de la qualification d’usager du service public vs celle de tiers, qui détermine la nécessité ou non de caractériser une faute de l’administration. Les tiers bénéficient en effet d’un régime de responsabilité sans faute. Les usagers, eux, relèvent de la responsabilité pour défaut d’entretien normal de l’ouvrage public.
Dans notre affaire, le juge administratif a retenu que le parent d’élève était un usager du service public. En effet, la requérante attendait la sortie de classe, à l’extérieur de l’établissement scolaire, et la chute de ce portail est intervenue alors qu’une surveillante avait entrepris de le fermer afin de filtrer la sortie des élèves. Dans ces circonstances, le juge retient que la mère avaient la qualité d’usager du service public et non celle de tiers.
La deuxième question était celle du lien de causalité entre l’ouvrage public et le dommage. Il n’était guère contestable que c’était l’ouvrage qui avait causé le dommage. L’administration peut cependant s’exonérer de sa responsabilité en rapportant la preuve soit de l’entretien normal de l’ouvrage, soit de ce que le dommage était imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure.
Dans cette affaire, le juge administratif relève qu’il existait un vice de conception du portail, qui eu égard à son importance et à sa visibilité, avait le caractère d’un vice apparent que le département ne pouvait légitimement ignorer lors de la réception de l’ouvrage. En outre, ce vice de conception est à l’origine exclusive du dommage subi par le parent d’élève. Dans ces conditions, la requérante était bien fondée à soutenir que l’accident était imputable à un défaut d’entretien normal de l’ouvrage public par le département ouvrant droit à indemnisation.
Le parent d’élève a donc été indemnisé à hauteur de 11.700 € pour son préjudice propre et 2500 € pour celui subi par son enfant.
Référence de la décision: Tribunal administratif de Strasbourg 19 novembre 2019 n° 1801013. Voir les conclusions éclairantes du rapporteur public Jean-Baptiste Sibileau (AJDA 2020 p.748 Dommages de travaux publics frappant les parents d’élèves).
Crédit image: Petrona Viera