Un maire ne peut pas interdire le stationnement de chiens sur la voie publique ni les bruits de conversation et de musique

Jusqu’où peut aller un maire en matière de lutte contre les nuisances sonores et atteintes à la tranquillité publique? Le Conseil d’Etat a donné une réponse en annulant partiellement, le 16 juillet 2021, l’arrêté du maire de Saint-Étienne « portant code de la tranquillité publique », pour atteinte excessive à la liberté personnelle et en particulier à la liberté d’aller et venir. Cette affaire illustre le contrôle – classique – exercé par le juge administratif sur la nécessité et la proportionnalité des mesures de police administrative au regard du trouble à l’ordre public.

Dans cette affaire, le maire de Saint-Etienne avait adopté un arrêté municipal qui prohibait en son article 1er « toute occupation abusive et prolongée des rues et autres dépendances ». L’arêtté précisait qu’était considéré comme portant atteinte à l’ordre public le regroupement de plus de deux chiens ou encore celui de plus de trois personnes diffusant de la musique ou émettant des éclats de voix.

Le tribunal administratif de Lyon, saisi par la Ligue des droits de l’homme (LDH) avait déjà annulé les dispositions de l’arrêté interdisant consommation d’alcool sur la voie publique et la fouille des poubelles mais avait validé la légalité de l’articler 1er susvisé. La LDH a donc porté l’affaire devant le cour administrative d’appel de Lyon puis devant le Conseil d’Etat.

Ce dernier retient que les dispositions de l’article 1er de l’arrêté attaqué « prohibent comme étant de nature à porter par soi-même atteinte à l’ordre public le seul fait de laisser plus de deux chiens stationner, même temporairement, sur la voie publique, ainsi que, de manière générale, le fait pour un groupe de plus de trois personnes d’émettre des bruits de conversation et de musique “audibles par les passants”, sans en préciser la durée ni l’intensité ».

Le juge administratif considère que les mesures ainsi édictées par l’arrêté litigieux « pour une durée de trois mois, sans aucune limitation de plage horaire et tous les jours de la semaine, dans un vaste périmètre géographique correspondant à l’ensemble du centre-ville de la commune, doivent être regardées, alors même que la commune de Saint-Étienne invoque une augmentation de la délinquance et des incivilités dans son centre-ville, comme portant, du fait du caractère général et absolu des interdictions ainsi prononcées, une atteinte à la liberté personnelle, en particulier à la liberté d’aller et venir, qui est disproportionnée au regard de l’objectif de sauvegarde de l’ordre public poursuivi ».

L’article 1er est donc également annulé.

Référence: Conseil d’Etat, 16 juillet 2021, N° 434254