Mineur étranger confié à l’aide sociale à l’enfance: injonction en référé liberté de l’affecter dans un établissement scolaire

Même au delà de 16 ans, tout élève a le droit d’être scolarisé rappelle le tribunal administratif de Marseille statuant en procédure de référé liberté, qui permet d’obtenir une décision du juge en moins de 48h.

L’affaire portait sur un mineur isolé étranger (aujourd’hui dénommé mineur non accompagné), arrivé en France en juillet 2022 et âgé de 16 ans, confié aux services de l’aide sociale à l’enfance jusqu’à sa majorité. Après avoir été soumis aux tests pour les élèves allophones nouvellement arrivés, il a été préconisé sa scolarisation en lycée général et technologique ou en lycée professionnel. Malgré cela, il n’a pas fait l’objet d’une scolarisation malgré les démarches effectuées en ce sens.

Le juge rappelle l’article  3-1 de la convention internationale des droits de l’enfant faisant primer l’intérêt supérieur de l’enfant et le principe constitutionnel d’égal accès à l’instruction ainsi que l’article 2 du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales consacrant également le droit à l’instruction.

Le juge considère sur ce fondement dans la lignée du Conseil d’Etat (CE, juge des réf., 15 févr. 2017, n° 407355,) que:

« La privation pour un enfant, notamment s’il souffre d’isolement sur le territoire français, de toute possibilité de bénéficier d’une scolarisation ou d’une formation scolaire ou professionnelle adaptée, selon les modalités que le législateur a définies afin d’assurer le respect de l’exigence constitutionnelle d’égal accès à l’instruction, est susceptible de constituer une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, au sens de l’article L. 5212 du code de justice administrative, pouvant justifier l’intervention du juge des référés sur le fondement de cet article, sous réserve qu’une urgence particulière rende nécessaire l’intervention d’une mesure de sauvegarde dans les quarante-huit heures. Le caractère grave et manifestement illégal d’une telle atteinte s’apprécie en tenant compte, d’une part, de l’âge de l’enfant, d’autre part, des diligences accomplies par l’autorité administrative compétente, au regard des moyens dont elle dispose. »

Le juge constate dans cette affaire l’absence de défense du recteur et donc de toute justification des diligences accomplies par l’administration.

Le juge reconnait donc que l’absence de scolarisation constitue  une atteinte grave et manifestement illégale à son droit à l’instruction.

Le juge du référé liberté du tribunal administratif ordonne en conséquence au recteur de scolariser l’enfant dans un établissement scolaire dans un délai de sept jours – sans que l’âge de l’enfant constitue un obstacle.

TA Marseille, 22 nov. 2022, n° 2209577 ; TA Marseille, 18 nov. 2022, n° 2209468.  Voir également CE, juge des réf., 15 févr. 2017, n° 407355, Lebon; TA Poitiers, 12 juill. 2016, n° 1601537. ;  TA Marseille, 8 déc. 2022, n° 2210152.  A contrario: refus pour un mineur car âgé de plus de 16 ans par un juge qui à notre sens confond obligation d’instruction et droit à l’instruction  : TA Marseille, 6 déc. 2022, n° 2210078.