Aller au contenu

La juridiction disciplinaire doit se prononcer sur tous les griefs dont elle est saisie

La juridiction disciplinaire doit se prononcer sur tous les griefs – à défaut de quoi la sanction peut être annulée. C’est ce que juge le Conseil d’Etat dans une affaire portant sur une sanction de blâme infligée à un professeur des universités-praticien.

Le ministre des solidarités et de la santé, la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation contestait devant le Conseil d’Etat la sanction prononcée par la juridiction disciplinaire compétente à l’égard des personnels enseignants et hospitaliers des centres hospitaliers et universitaires et des personnels enseignants de médecine générale.

Le Conseil d’Etat relève tout d’abord le périmètre -large – de la compétence de la juridiction disciplinaire qui inclut les faits indétachables de leur activité universitaire:

« l’activité universitaire et l’activité hospitalière des professeurs des universités – praticiens hospitaliers sont indissociables. Il résulte également de ces dispositions, interprétées au regard du principe fondamental reconnu par les lois de République de l’indépendance des enseignants-chercheurs, que si les professeurs des universités-praticiens hospitaliers ou les maîtres de conférence des universités-praticiens hospitaliers sont susceptibles de faire l’objet de poursuites devant les juridictions de l’ordre dont ils relèvent pour tout fait lié à l’exercice de leurs fonctions, il n’en va toutefois pas de même pour ceux de ces faits qui seraient indétachables de leur activité universitaire, lesquels ne sont susceptibles de fonder régulièrement des poursuites que devant la juridiction spécialisée instaurée par l’article L. 952-22 du code de l’éducation cité ci-dessus. »

Le juge relève que dans cette affaire la juridiction disciplinaire avait notamment été saisie des griefs tirés de la méconnaissance par le professeur, « des dispositions de l’article L. 1131-3 du code de la santé publique, imposant aux praticiens souhaitant procéder à des examens des caractéristiques d’une personne ou à son identification par empreintes génétiques à des fins médicales d’en obtenir l’agrément préalable auprès de l’agence de biomédecine, de l’article L. 5223-1 du code de la santé publique interdisant le recours à la publicité pour les dispositifs médicaux in vitro, de l’article L. 6154-2 du code de la santé publique qui prévoit que la durée de l’activité libérale d’un praticien hospitalier ne doit pas excéder 20% de la durée de son service hospitalier hebdomadaire et que cette activité est organisée de manière à garantir l’information des patients et la neutralité de leur orientation entre activité libérale et activité publique. »

Or la juridiction disciplinaire n’avait pas statué sur ces différents griefs.

Le Conseil d’Etat censure donc la sanction puisque « En s’abstenant de se prononcer notamment sur ces griefs, alors que les faits en cause relevaient de ses attributions, la juridiction disciplinaire compétente à l’égard des personnels enseignants et hospitaliers des centres hospitaliers et universitaires et des personnels enseignants de médecine générale a méconnu son office et insuffisamment motivé sa décision ».

La sanction est donc annulée et l’affaire renvoyée devant la juridiction disciplinaire.

CE, 4e chs, 10 octobre 2022, n° 447976.