A quelle condition un maire peut il suspendre le bénéfice d’aides municipales aux familles de mineurs troublant l’ordre public ? C’est la réponse à laquelle a répondu le tribunal administratif de Versailles par une décision du 9 mars 2023.
Dans cette affaire, les délibérations attaquées permettaient au maire de Poissy de suspendre le bénéfice de certaines prestations d’aides sociale facultative pour les familles dont un des membres mineurs aura fait l’objet d’un rappel à l’ordre. La suspension était également possible si le mineur avait fait l’objet d’un jugement définitif suite à une infraction troublant l’ordre public et si la famille a refusé l’accompagnement parental proposé par les services sociaux de la ville ou du département.
Le juge relève à juste titre que ce mécanisme est une sanction.
Plusieurs moyens étaient soulevés et auraient pu à seuls justifier la nullité des délibérations, tel que la méconnaissance du principe d’individualité des sanctions selon lequel une personne ne peut être sanctionnée pour des faits commis par autrui -(le parent pour des faits imputables à leur enfant). Était également soulevée, la méconnaissance du principe de la rupture d’égalité, compte-tenu de l’absence de lien entre la prestation sociale et le critère défini pour l’attribuer.
Le juge se fonde sur la méconnaissance du moyen tiré du principe de légalité des délits et des peines qui impose de définir précisément ce qui est sanctionnable et la sanction encourue.
En effet, relève le juge, « les délibérations en cause se bornent à renvoyer à l’existence d’un rappel à l’ordre, lequel peut en vertu de l’article L. 132-7 du code de la sécurité intérieure, être mis en œuvre lorsque des faits sont susceptibles de porter atteinte au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité ou à la salubrité publiques, et à des condamnations pour des infractions troublant l’ordre public, qui recouvrent un champ très large, sans préciser davantage les faits ou infractions concernés, ni la durée de la suspension que le maire est susceptible de prononcer. »
La Ligue des droits de l’Homme est par conséquent fondée à soutenir que le principe de légalité des délits et des peines a été méconnu. Les délibérations sont donc – de manière assez prévisibles – annulées.
Tribunal administratif de Versailles, 9 mars 2023 n°s 2102944 et 2102985
Voir également CE, 3-8 chr, 24 juin 2022, n° 454799.