Le droit administratif est rarement confronté au droit de la famille. C’est le cas avec cette affaire qui répond à la question suivante : un conseil municipal peut-il adopter une « charte des mariages » pour encadrer ces derniers ? C’est la question qui était posée au tribunal administratif suite à une délibération du conseil municipal de la commune d’Argenteuil qui avait adopté une charte des mariages réglementant la tenue des cérémonies de mariage civil en mairie, en édictant des règles de police visant à assurer la solennité de leur déroulement et le maintien du bon ordre au sein de la mairie et à ses abords lors des journées de célébration de ces cérémonies.
Le juge retient deux griefs : un de forme, un de fond.
D’une part, seul le maire peut édicter une telle réglementation dans le cadre du pouvoir de police générale qui lui est dévolu par la loi. Le conseil municipal n’avait pas compétence pour adopter la délibération attaquée. Par suite, les décisions contestées sont entachées d’un vice de compétence.
D’autre part, le maire ne justifie pas la nécessité d’une telle mesure de police en n’apportant pas la preuve des nombreux débordements qui auraient eu lieu lors de mariages dans le Val-d’Oise. Le juge considère que » pour établir son allégation, la commune ne produit que le courriel d’un seul riverain de la mairie, daté du 12 février 2022 soit postérieur à la décision attaquée, se plaignant du bruit des klaxons et des instruments de musique. Elle fait également référence à un incident survenu à Méry-sur-Oise en septembre 2021 ayant impliqué un cortège de mariages, sans établir que cet incident, qui a eu lieu sur la voie publique, ait concerné la mairie de Méry-sur-Oise ou ses abords immédiats que règlemente la mesure contestée. »
Le juge considère en conséquence qu’il n’y avait pas de risque de trouble à l’ordre public justifiant l’intervention d’une mesure de police réglementant la tenue des cortèges de mariage dans la mairie et à ses abords.
La délibération par laquelle le conseil municipal d’Argenteuil a adopté une charte des mariages est donc annulée. La police administrative cède le pas devant le droit à la vie privée.
TA Cergy-Pontoise, 4e ch., 15 septembre 2022, n° 2114220.