Le Conseil Constitutionnel a censuré l’accès des directeurs d’établissements scolaires au statut vaccinal des élèves prévu par la loi portant diverses dispositions de vigilance sanitaire comme portant une atteinte excessive au droit à la vie privée (Décision n° 2021-828 DC du 9 novembre 2021).
La loi portant diverses dispositions de vigilance sanitaire prévoyait en effet que par dérogation à l’exigence fixée à l’article L. 1110-4 du code de la santé publique consacrant le secret médical, les directeurs des établissements d’enseignement scolaire (primaire, collège et lycée) aient accès aux informations médicales relatives aux élèves. Cet accès était prévu pour une durée ne pouvant excéder la fin de l’année scolaire en cours. En outre, l’alinéa suivant leur permettait de procéder au traitement des données ainsi recueillies, aux fins de faciliter l’organisation de campagnes de dépistage et de vaccination et d’organiser des conditions d’enseignement permettant de prévenir les risques de propagation du virus.
Le Conseil constitutionnel reconnait que cette disposition législative participe à l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé, issu du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946.
Cependant, le Conseil constitutionnel considère que cette entorse au secret médical porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée. Ce principe, protégé de longue date par les traités européens et internationaux, a en effet valeur constitutionnelle depuis 1995 (18 janv. 1995, n° 94-352 DC) ; il est rattaché à la liberté consacrée par l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 depuis 1999 (Cons. const., 23 juill. 1999, n° 99-416 DC, cons. 45.). Ce droit impose que la collecte, l’enregistrement, la conservation, la consultation et la communication de données à caractère personnel doivent être justifiés par un motif d’intérêt général et mis en œuvre de manière adéquate et proportionnée à cet objectif. Cette jurisprudence est constante depuis une décision du Conseil constitutionnel n° 2012-652 DC, du 22 mars 2012.
Or, la loi contestée permettait d’accéder « non seulement au statut virologique et vaccinal des élèves, mais également à l’existence de contacts avec des personnes contaminées, ainsi que de procéder au traitement de ces données, sans que soit préalablement recueilli le consentement des élèves intéressés ou, s’ils sont mineurs, de leurs représentants légaux. » D’autre part, la loi permettait « l’accès à ces données et leur traitement tant par les directeurs des établissements d’enseignement scolaire des premier et second degrés que par « les personnes qu’ils habilitent spécialement à cet effet ». » Ainsi, « Les informations médicales en cause sont donc susceptibles d’être communiquées à un grand nombre de personnes, dont l’habilitation n’est subordonnée à aucun critère ni assortie d’aucune garantie relative à la protection du secret médical. » Enfin, le Conseil constitutionnel considère qu’ « en se bornant à prévoir que le traitement de ces données permet d’organiser les conditions d’enseignement pour prévenir les risques de propagation du virus, le législateur n’a pas défini avec une précision suffisante les finalités poursuivies par ces dispositions. » La disposition est donc censurée.
Référence: Décision n° 2021-828 DC du 9 novembre 2021