Le juge peut annuler le refus du maire de reconnaître le caractère familial d’une concession funéraire alors même que la concession ne précise pas sur le titre lui même le caractère familial. C’est la position du tribunal administratif de Versailles qui censure une lecture trop littérale d’un acte de concession funéraire et fait primer le « bons sens ».
Pour rappel, une concession funéraire familiale permet à la famille du titulaire d’y être inhumée, a contrario des concessions dites individuelles destinées aux seules personnes nommément désignées dans l’acte de concession funéraire. Un choix erroné de concession peut donc aboutir à une séparation souvent non voulue des défunts.
L’affaire en litige portait sur une concession acquise en 1955, pour une durée de 100 ans, au cimetière d’Arpajon, par Mme BC, pour y accueillir la sépulture de son époux. Elle y fut elle-même inhumée en 2007 et ses deux filles ont acquis par voie de succession les droits qu’elle détenait alors sur cette concession.
Au décès de sa sœur aînée, la fille cadette a sollicité auprès de la commune d’Arpajon un permis d’inhumation qui lui a été délivré en contrepartie de sa renonciation, par courrier du 21 janvier 2021, à faire procéder à de nouvelles inhumations dans le caveau familial.
La société des Pompes funèbres ayant cependant constaté, le jour des obsèques de sa sœur, que le caveau réalisé par sa mère comportait six places, et non trois comme l’affirmait la commune d’Arpajon, elle a souhaité se rétracter de la renonciation à laquelle elle avait consenti et a demandé à la commune d’Arpajon de bien vouloir reconnaître le caractère familial de la concession funéraire souscrite par sa mère. Du silence gardé par la commune est née une décision implicite de rejet contestée devant le juge administratif.
Le juge relève que certes, « la concession conclue le 27 septembre 1955 entre Mme B C et la commune d’Arpajon stipule qu’elle a pour effet d’accueillir sur l’emplacement désigné la sépulture de M. A C ».
Cependant, » Si cet acte ne mentionne pas le caractère familial de cette concession, il ne précise cependant pas non plus qu’elle a vocation à n’accueillir que la sépulture particulière de ce dernier. »
En outre, « il ressort de l’attestation de l’entreprise « Les granits Floury », datée du 21 janvier 2021, que celle-ci a conçu en 1956 un caveau de six places en case double pouvant accueillir six défunts, afin de respecter la volonté de Mme B C de faire construire un caveau familial susceptible d’accueillir plusieurs membres de sa famille ».
L' »entreprise atteste en outre avoir constaté, le jour de l’inhumation de la sœur de la requérante, qu’il restait encore trois places disponibles. »
Autre élément pris en compte, « les faire-part de décès de M. A C indiquant son inhumation « au cimetière d’Arpajon dans le caveau de famille ».
Ainsi, le juge considère que le courrier de rétractation de Mme C, rédigé la veille des obsèques de sa sœur en contrepartie de la délivrance d’un permis d’inhumation, ne saurait valablement lui être opposé ».
Le juge annule donc pour erreur manifeste d’appréciation la décision implicite par laquelle le maire de la commune d’Arpajon a rejeté sa demande tendant à la reconnaissance du caractère familial de la concession funéraire souscrite par sa mère. La famille pourra donc reposer réunie.
TA Versailles, 1re ch., 15 juin 2023, n° 2104408.