Peut on saisir le juge en urgence lorsque son enfant n’est pas affecté dans son collège de secteur? La réponse est positive comme l’a confirmé le tribunal administratif de Cergy-Pontoise dans une décision récente, qui apporte une illustration intéressante sur le contrôle effectué par le juge et les arguments pouvant être utilisé par les rectorats et les parents.
Dans cette affaire, la mère de l’élève avait demandé via la fiche de liaison, l’affectation dans le collège de secteur (correspondant à l’adresse de la résidence effective, en corrigeant à la main l’adresse). Or, le rectorat l’avait affecté dans le collège correspondant à son ancienne adresse indument prise en compte. La décision d’affectation était déférée devant le juge des référés du tribunal administratif.
Le juge du référé procède classiquement en deux temps, s’agissant d’un référé suspension, en vérifiant l’urgence à statuer puis l’existence d’un doute sérieux quant à la légalité de la décision.
Il reconnait tout d’abord qu’il y a urgence à statuer en référé « Eu égard à la proximité de la rentrée scolaire, fixée au 1er septembre 2022 et à la circonstance que l’exécution de cette décision va priver la jeune C D de la scolarisation dans son établissement public de secteur, ce dont elle peut bénéficier de plein droit en application des dispositions susvisées du code de l’Education ». Le juge considère que « ladite décision est de nature à porter une atteinte suffisamment grave et suffisamment immédiate à sa situation ainsi qu’à celle de sa mère, quand bien même le collège où l’administration l’a affectée est située sur le territoire de la même commun ».
Ce point est important puisque le juge considère que la privation de ce droit et la proximité de la rentrée sont suffisant en eux-mêmes pour justifier l’urgence sans qu’il y ait à ajouter des circonstances particulières, par exemple sur les conséquences graves qu’aurait ladite décision sur l’enfant.
Le juge reconnaît dans un second temps qu’il y a bien un doute sérieux quant à la légalité de la décision. En effet, l’affectation dans le collège de secteur est de droit selon le code de l’éducation en application de l’article D. 211-11 du Code de l’éducation qui prévoit que « Les collèges et les lycées accueillent les élèves résidant dans leur zone de desserte. »
L’intérêt de la décision est que le juge écarte l’argument – classique -opposé en défense par les rectorats qui répondent qu’il n’y a plus de place – en prenant en compte la date de la décision et en écartant le fait que le collège ait pu depuis être rempli via l’acceptation d’élèves hors secteurs. Mais le juge administratif n’est pas dupe et relève que:
» si en défense, l’Éducation nationale fait valoir que la décision attaquée était motivée par la circonstance que la capacité d’accueil du collège Louis Pasteur était déjà atteinte, il ne ressort pas des termes de cette décision qu’elle ait été prise pour un tel motif, la capacité d’accueil de l’établissement n’y étant évoquée comme critère à prendre en considération, qu’: « après affectation des élèves du secteur ». En tout état de cause, elle n’établit pas que tel aurait été d’ores et déjà le cas au 7 juin 2022, date de cette décision, alors que les inscriptions des élèves auxquelles doivent procéder les parents, seules de nature à confirmer leur affectation définitive à un collège donné et donc, à permettre de vérifier que la capacité d’accueil de ce collège est effectivement atteinte, étaient prévues jusqu’au 17 juin 2022. «
Le juge des référés du tribunal administratif suspend donc la décision et enjoint à la directrice académique des services de l’Éducation nationale (DASEN) des Hauts-de-Seine d’affecter la jeune au collège Louis Pasteur à Neuilly-sur-Seine, dans un délai de 10 jours.
Décision commentée: TA Cergy-Pontoise, 9 août 2022, n° 2210705. Voir également dans le même sens: TA Paris, 11 février 2010, , n° 09134418 ; CAA Lyon, 4 octobre 2018, n° 16LY04404).
Voir également : comment contester une décision d’affectation ?