Inapplicabilité d’une ordonnance rédigée en langue allemande

Un texte juridique de droit français peut il être rédigé en allemand ? Nein, répond le tribunal administratif de Strasbourg.

L’affaire portait sur des dispositions de  l’ordonnance du 10 juillet 1873 prises pour l’exécution de la loi du 12 février 1873, qui étaient rédigées en allemand, et qui étaient opposées  au requérant par le recteur de l’académie de Strasbourg.

Certes, l’article L. 481-1 du code de l’éducation prévoit que « Les dispositions particulières régissant l’enseignement applicables dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle y demeurent en vigueur ».

Cependant, le juge relève que l’article 2 de la Constitution dispose quant à lui: « La langue de la République est le français » et qu’aux termes de l’article 12 de la loi du 1er juillet 1924 : « Les textes des lois locales maintenues en vigueur par la présente loi seront publiés en français, à titre documentaire, avec les modifications de rédaction résultant de la présente loi ».

Le juge administratif considère donc dès lors que les textes non rédigés en français ne sont pas opposables. Le recteur de l’académie de Strasbourg soutenait en défense qu’une traduction intégrale de l’ordonnance du 10 juillet 1873 a été publiée au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture du Bas-Rhin du 7 août 2020.

Cela n’est pas suffisant pour le juge administratif :

« Toutefois, à défaut d’un arrêté de la préfète de la région Grand Est mentionnant de manière explicite que les termes reproduits dans ledit arrêté, ou en annexe, vaudront traduction officielle de l’ordonnance litigieuse, et à défaut de signature par la préfète de cet arrêté, la traduction publiée le 7 août 2020, simple reproduction d’un texte d’origine inconnue, est insuffisante à garantir l’accès en langue française aux dispositions de l’article 9 de l’ordonnance du 10 juillet 1973, qui doivent ce faisant être écartées comme contraire à l’article 2 de la Constitution. »

Dès lors le requérant était fondé à soutenir que les décisions qui faisaient application de dispositions contraires à la Constitution étaient entachées d’erreur de droit.

TA Strasbourg, 2e ch., 7 juin 2023, n° 2102209. 

Voir également CAA  Nancy, ° 18NC01505 9 juillet 2020 ; TA Strasbourg, 15 mars 2018, n° 1604621 ; Conseil d’État, 9ème – 10ème chambres réunies, 01/04/2022, 450613