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Suspension d’un refus d’agrément dirigeant  du Conseil national des activités privées de sécurité

Peut-on contester en référé un refus de délivrance d’agrément « dirigeant »  opposé par le Conseil national des activités privées de sécurité ? Quelles sont les données personnelles que peut utiliser le Conseil national des activités privées de sécurité  (CNAPS) dans le cadre de son enquête ? C’est à ces questions que répond le tribunal administratif de Paris, utiles pour toutes les professions où ce type d’agrément est requise et où le demandeur fait l’objet d’une enquête administrative défavorable.

L’affaire portait sur un refus de délivrance de l’agrément dirigeant, opposé aux motifs que la la demanderesse avait été mise en cause en juin 2021 pour un fait de délit de fuite après un accident de voiture,  en octobre 2005 pour un fait de banqueroute, et en 2014 pour un fait de violence commise en réunion suivie d’incapacité n’excédant pas 8 jours.

Le tribunal administratif rappelle le régime juridique de l’agrément, fixé à l’article L. 612-7 du code de la sécurité intérieure pour diriger ou être associé, d’activités privées de surveillance et de gardiennage, de transport de fonds, de protection physique des personnes et de protection des navires:

« L’agrément ne peut être délivré s’il résulte de l’enquête administrative, ayant le cas échéant donné lieu à consultation, par des agents du Conseil national des activités privées de sécurité spécialement habilités par le représentant de l’Etat territorialement compétent et individuellement désignés, des traitements de données à caractère personnel gérés par les services de police et de gendarmerie nationales relevant des dispositions de l’article 31 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, à l’exception des fichiers d’identification, que son comportement ou ses agissements sont contraires à l’honneur, à la probité, aux bonnes mœurs ou sont de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes ou des biens, à la sécurité publique ou à la sûreté de l’Etat et sont incompatibles avec l’exercice des fonctions susmentionnées. ».

Cet article est à lire à la lumière de l’article 230-8 du code de procédure pénale qui prévoit que les données personnelles ne peuvent être consultées en cas d’enquête administration s’agissant des faits classés sans suite ou ayant donné lieu à non lieu.

Or dans cette affaire, les faits reprochés à l’intéressée portait sur des faits de 2014 et 2021 classés sans suite, et le juge considère donc que:

« Dans ces conditions, l’enquête administrative ayant précédé les décisions attaquées ne pouvaient donner lieu à la consultation du traitement en cause sur ces faits. »

De manière complémentaire, le juge considère qu’en tout état de cause, la responsabilité de la requérante n’est pas établie et que les faits visés ne revêtaient  pas un degré de gravité permettant d’en déduire une incompatibilité avec les fonctions pour lesquelles l’agrément est demandé. Ainsi, le délai de fuite reproché dans l’enquête administrative portait sur un accrochage de rétroviseur…

Pour les faits de 2005, le juge prend en compte leur ancienneté et de l’âge de la requérante au moment des faits pour les écarter:

En conclusion, le juge administratif considère que le moyen tiré de l’inexacte application des dispositions de l’article L. 612-7 du code de la sécurité intérieure est de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de décision contestée.

Il est à noter que la condition de l’urgence est retenue au regard de la situation précaire financière de la requérante, d’un contexte familial difficile, et de la création en cours de la société de sécurité privée qui devrait lui permettre de se dégager un revenu à court terme.

Le juge administratif suspend donc la décision portant refus d’agrément et enjoint la délivrance d’un agrément dirigeant provisoire (sous réserve que la requérante remplisse les autres conditions propres à la délivrance de ce dernier).

Décision commentée: TA Paris, 7 oct. 2022, n° 2219499.

Voir également CAA Marseille, 8e ch., 6 oct. 2020, n° 19MA01900 ; TA Grenoble, 28 janv. 2016, n° 1300741 ; TA Châlons-en-Champagne, 3 févr. 2015, n° 1401563 ; TA Cergy-Pontoise, 2 févr. 2016, n° 1412133 ; CAA Douai, 1re ch. – formation à 3, 13 juill. 2017, n° 16DA01646 ; TA Rouen, 28 janv. 2014, n° 1201005.