Une affaire portée devant le Conseil d’Etat permet de revenir sur le droit applicable à la profession d’éducateur sportif et au mécanisme d’interdiction d’exercice temporaire commun à de nombreuses professions réglementées. (CE 30 mars 2021, n°432181).
Dans l’affaire portée devant le Conseil d’Etat, un accident mortel avait eu lieu au sein d’un établissement de plongée. Le préfet avait pris en conséquence un arrêté à l’encontre de l’éducateur sportif en cause, qui lui interdisait l’exercice contre rémunération, pour une durée de six mois, des fonctions d’enseignement, d’animation ou d’encadrement de l’activité de plongée subaquatique.
Pour rappel, la profession d’éducateur sportif est régie par les articles L. 212-1 et suivants et R. 212-1 et suivants du code du sport. Selon ces articles, il est nécessaire de détenir un diplôme, titre à finalité professionnelle ou certificat de qualification professionnelle pour pouvoir contre rémunération, enseigner, animer ou encadrer une activité physique ou sportive ou entraîner ses pratiquants, à titre d’occupation principale ou secondaire, de façon habituelle, saisonnière ou occasionnelle.
Le respect de ces dispositions est contrôlé par l’Etat et plus particulièrement par le préfet. En application de l’article L. 212-13 du code du sport, ce dernier peut, par arrêté motivé, prononcer à l’encontre de toute personne dont le maintien en activité constituerait un danger pour la santé et la sécurité physique ou morale des pratiquants l’interdiction d’exercer, à titre temporaire ou définitif, tout ou partie des fonctions d’éducateur sportif. Le préfet peut également enjoindre à toute personne exerçant en méconnaissance des dispositions du I de l’article L. 212-1 et de l’article L. 212-2 de cesser son activité dans un délai déterminé.
L’arrêté est en principe pris après avis d’une commission comprenant des représentants de l’État, du mouvement sportif et des différentes catégories de personnes intéressées (il s’agit du conseil départemental de la jeunesse, des sports et de la vie associative). Cependant, en cas d’urgence, le préfet peut prononcer, sans consultation de cette commission, une interdiction temporaire d’exercice limitée à six mois.
C’est la question de cette urgence qui était examinée par le Conseil d’Etat. Le préfet avait en effet considéré qu’il existait une situation d’urgence justifiant de prendre une mesure d’interdiction temporaire sans recourir à la consultation préalable du conseil départemental de la jeunesse, des sports et de la vie associative normalement prescrite par les texte. La question était donc de définir si le professeur de plongée faisait – ou non – peser un risque pour la sécurité des pratiquants de nature à caractériser une situation d’urgence justifiant une interdiction d’exercice temporaire prise sans procédure contradictoire.
Le tribunal administratif de Toulon avait dans un premier temps rejeté la demande d’annulation de la requérante mais la cour administrative d’appel lui avait au contraire, donné raison, estimant « que la poursuite de l’activité […] n’exposait pas les plongeurs faisant appel à ses services à un risque caractérisant une urgence de nature à dispenser le préfet de toute procédure préalable, dont la consultation de la commission prévue à l’article L. 212-13 du code du sport » (CAA Marseille, 29 avril 2019, n° 18MA04314).
Le Conseil d’Etat annulé l’arrêt de la CAA en considérant qu’en sa qualité de directrice de plongée, l’intéressée était soumise, en application de l’article A. 322-72 du code du sport, à des responsabilités propres, notamment pour assurer la sécurité des plongeurs, et qu’il ressortait des pièces du dossier soumis aux juges du fond que plusieurs manquements lui étaient reprochés, dont un défaut de surveillance et de vigilance au regard des conditions météorologiques défavorables et de la compétence des plongeurs laissés seuls. Le Conseil d’Etat a donc considéré la suspension temporaire pouvait être prise en urgence sans consultation préalable du conseil départemental de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Référence: Conseil d’Etat 30 mars 2021, n°432181