Comment faire suspendre une décision de déréférencement d’un organisme de formation par la CDC ?

Que faire si la Caisse des dépôts et consignations décide le déréférencement d’un organisme de formation de la plateforme « MonCompteFormation  »  ? Il est possible de faire appel à un avocat pour saisir le tribunal administratif, comme le rappelle une ordonnance du tribunal administratif de Dijon.

Dans cette affaire, un organisme de formation délivrait, par l’intermédiaire de la plateforme « moncompteformation.gouv.fr », des actions de formation, non certifiantes, d’aide à la création et à la reprise d’entreprises, dites formations ACRE. La Caisse des dépôts et consignations avait suspendu son référencement sur le site« mon compte formation » pour une durée de neuf mois pour un triple motif:

  • absence de preuve de la viabilité économique des projets de ses stagiaires
  • absence de preuve de sa capacité à les accompagner,
  • Absence de preuve de la réalité du suivi pédagogique mis en œuvre et du contenu de la formation ACRE.

L’organisme de formation a saisi le tribunal administratif par référé suspension qui a suspendu la décision de deréférencement en retenant l’urgence à statuer et l’existence d’un doute sérieux quant à la légalité de la décision de déréférencement.

Tout d’abord, en ce qui concerne l’urgence, le juge relève les conséquences graves de la décision sur la société, attestées par un expert-comptable, puisque 80% de son chiffre d’affaires vient du CPF. Ainsi :

« bien qu’elle ne fasse pas obstacle, par elle-même, à ce que la société requérante poursuive d’autres actions de formation, la décision, en ce qu’elle prononce son déréférencement du service dématérialisée « mon compte formation » met un terme à l’exercice de l’essentiel de son activité annuelle pour une durée de neuf mois et porte ainsi une atteinte suffisamment grave et immédiate à ses intérêts pour que la condition d’urgence puisse être regardée comme remplie. »

En ce qui concerne l’existence de moyens propres à créer un doute sérieux, le juge du référé s’appuie sur l’article  R. 6333-6 du code du travail :

« Lorsque la Caisse des dépôts et consignations constate un manquement de l’un des prestataires mentionnés à l’article L. 6351-1 aux engagements qu’il a souscrits, elle peut, selon la nature du manquement, lui prononcer un avertissement, refuser le paiement des prestations, demander le remboursement des sommes qu’elle lui a indûment versées et suspendre temporairement son référencement sur le service dématérialisé mentionné à l’article L. 6323-9.

Ces mesures, proportionnées aux manquements constatés, sont prises après application d’une procédure contradictoire et selon des modalités que les conditions générales d’utilisation du service dématérialisé précisent () ». Selon l’article 2 des conditions générales, les conditions générales d’utilisation (CGU) : « () sont composées de Conditions Générales et de Conditions Particulières spécifiques aux Titulaires de compte et aux Organismes de formation ». Enfin, aux termes de l’article 4.2.2 des conditions particulières spécifiques aux organisme de formation : « Lorsque la CDC constate des manquements répétés ou graves aux CG et aux présentes CP, elle peut suspendre le référencement de l’Organisme de formation. / Cette mesure, proportionnée au manquement constaté, est prise après application d’une procédure contradictoire, conformément à l’article 13 des CG. / () / La durée du déréférencement peut s’étendre d’une semaine (7 jours) à 1 (un) an, selon la nature du ou des manquements () ».

En l’état de l’instruction, le moyen tiré de ce que la Caisse des dépôts et consignations a entaché sa décision d’une erreur d’appréciation en infligeant à la société requérante un déréférencement d’une durée de neuf mois est de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée.

Le juge des référés suspend donc l’exécution de la décision par laquelle le directeur de la formation professionnelle et des compétences de la Caisse des dépôts et consignations a prononcé le déréférencement de la société de la plateforme « mon compte formation » pour une durée de neuf mois.

TA Dijon, ord. 3 août 2022, n° 2201793. Voir également pour une suspension pour méconnaissance du principe du contradictoire :TA Lyon, 5 janv. 2023, n° 2209477  et sur le caractère disproportionné de la sanction TA Amiens, 18 oct. 2022, n° 2203140.

voir aussi en  : TA Paris, 16 août 2022, n° 2216166 ; TA Strasbourg, 12 sept. 2022, n° 2205613 ;CE, 1re ch., 28 nov. 2022, n° 467156 TA Paris, 24 oct. 2022, n° 2222027.