Le tribunal administratif de Rouen a suspendu un refus d’autorisation d’instruction en famille par une ordonnance du 15 juillet 2022. C’est une des premières décisions favorables rendues dans le cadre du nouveau régime d’instruction en famille soumettant à autorisation ce mode d’instruction.
Le tribunal reconnaît en premier lieu l’urgence à statuer. L’urgence est retenue pour la simple raison que la décision a pour effet de contraindre la requérante d’inscrire dès maintenant l’enfant en vue de le scolariser en septembre 2022 dans un établissement scolaire en capacité de l’accueillir (cf. l’ordonnance similaire du tribunal administratif de Lille).
Le tribunal administratif de Rouen reconnaît en outre que la décision est entachée d’un doute sérieux quant à sa légalité en considérant que le refus d’accorder l’IEF est entachée d’erreur d’appréciation et méconnait l’intérêt supérieur de l’enfant. L’intérêt supérieur de l’enfant est pour mémoire, consacré à l’article 3-1 de la convention de New York, et est opposable à l’administration ; il sert très régulièrement de base légale aux décisions en droit de l’éducation.
Sur ce point, l’ordonnance ne précise pas les éléments de fait l’ayant fait retenir cet argument mais ressort cependant des éléments portés à notre connaissance que le motif sollicité par les parents était relatif à la santé de l’enfant.
Référence: Tribunal administratif de Rouen, ord. 15 juillet 2022, DASEN de l’EURE, n°2202626 (une décision transmise par NonSco’llectif)
Voir également dans le même sens, une belle décision du tribunal administratif de Melun
« D’une part, il résulte de l’instruction, et notamment des pièces médicales produites A les requérants, que le jeune B, scolarisé depuis la rentrée scolaire 2022 alors qu’il n’a pas encore trois ans, a développé depuis sa scolarisation des troubles psychologiques marqués A un état de tristesse, une grande fatigue, des réveils nocturnes, des troubles anxieux caractérisés A des maux de ventre et des maux de dos, et même une régression au niveau du langage, alors qu’il s’agissait auparavant d’un enfant épanoui et éveillé dans le cadre d’une instruction en famille. Ce qui est paradoxal quand on veut bien se rappeler que la scolarisation est censée éveiller le jeune enfant et non le faire régresser. Il ressort également des pièces du dossier que le jeune B se retient toute la matinée d’aller uriner, ce qui peut générer à cet âge précoce des troubles urinaires graves avec infection. D’autre part, il ressort des pièces du dossier, et plus particulièrement du projet éducatif, que le jeune B bénéficierait de la méthode Montessori d’éducation alternative basée sur la confiance en soi, l’autonomie et l’apprentissage en douceur, méthode adaptée au caractère du jeune B naturellement très sociable et disposant d’un bon niveau de langage. A suite, en considérant dans sa décision du 29 août 2022 que les éléments constitutifs de la demande d’autorisation en famille n’établissent pas l’existence d’une situation propre à l’enfant motivant le projet éducatif, le rectorat a entaché sa décision d’erreur de droit. En conséquence, il existe un doute sérieux quant à la légalité de cette décision. » (TA Melun, 10 novembre 2022, n° 2210542)