La caisse des dépôts doit respecter une procédure contradictoire avant de prendre une décision de déréférencement et de recouvrement des sommes, juge le tribunal administratif de Melun.
L’affaire portait sur une décision de la Caisse des dépôts et consignations qui a prononcé à l’égard d’un organisme de formation une décision de déréférencement pour une durée de douze mois, de recouvrement des sommes versées et de non-paiement des sommes concernant les dossiers de formation engagée et le non-reversement, le cas échéant, des sommes rétrocédées par son établissement bancaire. Cette décision a été motivée par la constatation de non-conformités graves, et en particulier par des indices d’anomalies liés aux données de connexion et révélateur, selon la caisse, d’un schéma de fraude.
Le juge retient tout d’abord l’urgence à statuer dès lors que « le chiffre d’affaires actuel de la société requérante provient exclusivement de son activité sur la plate-forme « Compte personnel de formation » et qu’elle ne dispose pas d’autres sources de revenus.
S’agissant de la légalité de la décision, le juge rappelle l’existence du contradictoire, prévue par le code du travail, par le code des relations entre le public et l’administration et par les conditions générales d’utilisation de la plateforme « Mon Compte Formation
Or, dans cette affaire, il n’était pas contesté par la Caisse des dépôts et consignations, que la décision du 8 mars 2023 n’a été précédée d’aucune procédure contradictoire exposant à la société requérante les faits qui lui étaient reprochés.
Si la Caisse des dépôts et consignations soutient qu’il y avait un intérêt public à faire cesser rapidement la fraude identifiée, en particulier parce que la société se serait rendue coupable d’usurpation d’identité par une prise de contrôle des comptes de titulaires à leur insu dans le seul objectif de débiter leurs droits au compte personnel de formation et la création frauduleuse d’identités numériques à partir de documents d’identité réels à l’insu de leurs titulaires, elle n’établit toutefois ni la nature exacte de cette fraude, et en particulier le nombre de personnes dont l’identité aurait été usurpée par la société requérante aux fins des détournements allégués, ni son importance, eu égard au chiffre d’affaires réduit de la société requérante, qui conteste au demeurant s’être rendue coupable de telles manœuvres, de sorte qu’elle ne justifie pas de l’urgence qu’il y aurait eu, préalablement à la décision contestée, à ne pas engager la procédure contradictoire prévue à l’article 13 des conditions générales d’utilisation de la plateforme « Mon Compte Formation ».
La décision est donc suspendue en urgence. Il est enjoint à la Caisse des dépôts et consignations de réintégrer sans délai l’organisme de formation sur la plateforme du Compte Personnel de Formation et de lui remettre les fonds lui étant destinés et retenus en application de la décision du 8 mars 2023.
Décision commentée: TA Melun, 24 mai 2023, n° 2304071.