Le juge peut suspendre les décisions d’exclusion prises à l’encontre des élèves en cas de vice de procédure, et il peut le faire en référé. C’est ce qui est rappelé par une intéressante décision du tribunal administratif de Bordeaux.
Dans cette affaire, la rectrice de l’académie de Bordeaux avait prononcé à l’encontre d’un élève en classe de première une sanction d’exclusion temporaire définitive sans sursis de l’établissement. Le juge administratif était saisi d’un référé suspension, qui permet d’examiner la légalité de la décision, en urgence (environ 1 mois de procédure).
Le juge du référé retient tout d’abord l’urgence à statuer, quand bien même l’élève aurait du être rescolarisé ailleurs. Le juge prend en compte au titre de l’urgence l’éloignement géographique de l’autre établissement, et la différence de matières enseignées:
« Si [l’élève] a pu être réaffecté au lycée de la mer de Gujan-Mestras, il n’est pas contesté que cet établissement à dominante technologique et d’insertion professionnelle, situé à plus de 45 minutes de voiture de son domicile, ne propose pas d’enseignement du latin, matière optionnelle qu’il suit depuis cinq ans, et ne lui permettra pas de continuer à bénéficier des cours de spécialité dispensés en anglais dans le cadre de la section européenne du lycée Nord Bassin – Simone Veil. »
Le juge prend également en compte l’impact de la sanction sur le dossier parcoursup de l’élève:
« Alors qu’il ressort des pièces du dossier que l’intéressé est un bon élève, cette circonstance, de même que la mention de la sanction dans son dossier, aura nécessairement une incidence non négligeable sur l’appréciation qui sera portée sur son dossier scolaire dans le cadre du processus d’orientation sélective « Parcoursup », dont la phase de finalisation des vœux s’achèvera avant que le juge du fond ait statué sur sa requête en annulation. »
Le juge du référé retient enfin s’agissant toujours de l’urgence, l’impact sur les épreuves du bac français puisque les textes étudiés n’étaient pas les mêmes entre les deux établissements:
« En outre, les requérants font valoir sans être contredits que certains des textes étudiés dans le nouveau lycée d’affectation de leur fils pour les épreuves de français du baccalauréat qui vont se dérouler à compter du 15 juin 2023 ne sont pas ceux qu’il avait préparés.' »
L’urgence est donc retenue malgré la rescolarisation possible de l’enfant dans un autre lycée.
En ce qui concerne la légalité de la décision, le juge sanctionne la méconnaissance de l’article D. 511-39 du code de l’éducation, faute pour la commission d’appel d’avoir entendu deux professeurs et deux délégués de classe. La décision est à cet égard étonnante puisque c’est le conseil de discipline et non la commission d’appel qui doit entendre les deux professeurs. Le juge retient en tout état de cause également la disproportion de la sanction.
L’exclusion définitive sans sursis de l’élève est donc suspendue.
TA Bordeaux, 17 mai 2023, n° 2302329.