Le régime juridique de la responsabilité des enseignants

Les enseignants et plus généralement les membres de l’enseignement peuvent parfois commettre des faits de nature à engager leur responsabilité – ou celle de leur administration. Soit par une action, tel qu’un acte de violence, ou du harcèlement, soit plus souvent par une carence, notamment un défaut de surveillance ou une surveillance insuffisante des élèves placées sous leur responsabilité.

Le manquement fautif à l’obligation de surveillance

L’obligation de surveillance est prévue par l’article D. 321-12 du Code de l’éducation qui prévoit que « La surveillance des élèves durant les heures d’activité scolaire doit être continue et leur sécurité doit être constamment assurée en tenant compte de l’état de la distribution des locaux et du matériel scolaires et de la nature des activités proposées ».

Cette obligation est précisée par la circulaire n°97-178 du 18 septembre 1997 relative à la surveillance et la sécurité des élèves dans les écoles maternelles et élémentaires publiques et par la circulaire n° 96-248 du 25 octobre 1996 pour les collèges et lycées.

Les enseignants sont responsables de leurs fautes et des dommages causés par eux, mais également de celles causées par leurs élèves qu’ils surveillent (article 1242 du code civil).

Cette responsabilité élargie concerne les enseignants, mais plus largement tous ceux qui ont des fonctions de direction dans l’établissement (principaux, proviseurs…), ou qui sont chargés de la surveillance : conseillers d’éducation, surveillants, CPE… En revanche, les personnels administratifs sont exclus de cette responsabilité puisqu’ils n’ont pas une obligation de surveillance des élèves. Ils restent en revanche responsable de leurs fautes propres, tel qu’un acte de violence.

Pour qu’il y ait indemnisation, il est nécessaire qu’il y ait faute, et que cette dernière résulte d’un défaut de surveillance. Le juge va rechercher comment se serait comporté un enseignant « compétent » (ou autre personnel chargé de la surveillance) dans une situation identique

La responsabilité de l’Etat en lieu et place de l’enseignant fautif

Les enseignants sont responsables. Cependant les parents de l’élève victime ne peuvent pas engager sa responsabilité. La responsabilité de l’Etat se substitue à celle de l’enseignant.

L’article L 911-4 du code de l’éducation dispose en effet:

« Dans tous les cas où la responsabilité des membres de l’enseignement public se trouve engagée à la suite ou à l’occasion d’un fait dommageable commis, soit par les élèves ou les étudiants qui leur sont confiés à raison de leurs fonctions, soit au détriment de ces élèves ou de ces étudiants dans les mêmes conditions, la responsabilité de l’Etat est substituée à celle desdits membres de l’enseignement qui ne peuvent jamais être mis en cause devant les tribunaux civils par la victime ou ses représentants.

Il en est ainsi toutes les fois que, pendant la scolarité ou en dehors de la scolarité, dans un but d’enseignement ou d’éducation physique, non interdit par les règlements, les élèves et les étudiants confiés ainsi aux membres de l’enseignement public se trouvent sous la surveillance de ces derniers. » 

Cet article a été utilement précisé par la circulaire n°97-178 du 18 septembre 1997 précitée et la circulaire n° 96-248 du 25 octobre 1996 applicables aux écoles primaires, et aux collèges et lycées.

Même si c’est la responsabilité de l’Etat qui est engagée, ce contentieux est jugé par les tribunaux judiciaires et non par les tribunaux administratifs. L’action en responsabilité doit être portée devant le tribunal judiciaire du lieu où le dommage a été causé. L’action devra être dirigée contre le rectorat compétent, représentant l’Etat. Ce mécanisme rend impossible l’action directe de la victime contre l’auteur ou le responsable réel du dommage devant le juge judiciaire.

En revanche, l’Etat peut agir contre l’enseignant fautif: soit par une procédure disciplinaire, soit en se retournant contre ce dernier pour récupérer le montant de l’indemnisation que l’Etat a du verser à la famille.

Cas des écoles privées : L’article L. 911-4 du code de l’éducation qui prévoit que l’Etat se substitue à la responsabilité des enseignants s’applique également aux élèves privées sous contrat. C’est donc le même régime juridique qui s’applique (Cass. civ. 2e du 24.4.81, n° 79-14666). Pour les écoles privées hors contrat, le mécanisme de substitution ne s’appliquera pas. Les parents pourront donc rechercher la responsabilité de l’enseignant en cas de défaut de carence, ou de l’établissement si le problème est la conséquence d’une carence de l’école. Ils ne pourront pas engager la responsabilité de l’Etat.

NB: Si ce n’est pas le défaut de surveillance d’un enseignant qui a permis ou causé l’accident, mais un problème systémique d’organisation du service tel qu’un manque de personnel ou un équipement défaillant, c’est l’Etat qui sera responsable du dommage causé à l’enfant. Le parent d’élève devra rechercher la responsabilité de l’Etat (via le rectorat) devant le tribunal administratif.

 

Responsabilité pénale des enseignants

Dès lors qu’une infraction pénale a été commise par l’enseignant, une action pénale peut être diligentée en parallèle de la procédure judiciaire. Elle peut l’être soit par le ministère public (procureur) soit par la victime qui peut se constituer partie civile.

Cette action s’appuie sur les infractions du code pénal et notamment le délit d’imprudence (article 121-3 du code pénal). Ce délit est constitué en cas de négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence prévu par la loi et les règlements, lorsqu’ils ont été cause d’une atteinte à l’intégrité de la personne.

Il convient de préciser que l’article 11 bis A du statut général de la fonction publique résultant de la loi n°96-393 du 13 mai 1996, précise que les fonctionnaires et agents publics ne peuvent être condamnés sur un tel fondement « que s’il est établi qu’ils n’ont pas accompli les diligences normales compte tenu de leurs compétences, du pouvoir et des moyens dont ils disposaient ainsi que des difficultés propres aux missions que la loi leur confie ».