Illégalité d’une interdiction d’accès aux enceintes et locaux de l’université jusqu’à ce que la section disciplinaire du conseil académique de l’établissement ait statué

Un président d’université peut-il interdire à un étudiant l’accès à l’université durant toute la procédure disciplinaire quand ladite procédure n’a pas commencé  ? Le tribunal administratif de Paris répond à cette question par la négative.

Le président de l’université peut certes prendre des mesures pour assurer l’ordre et la sécurité au sein de l’université (article R. 712-1, R. 712-6 , et R. 712-8 du code de l’éducation). Et il peut dans ce cadre interdire l’accès aux locaux en principe pour une durée de trente jours maximum:

 « En cas de désordre ou de menace de désordre dans les enceintes et locaux définis à l’article R. 712-1, l’autorité responsable (…) peut interdire à toute personne et, notamment, () à des usagers de l’établissement () l’accès de ces enceintes et locaux. / Cette interdiction ne peut être décidée pour une durée supérieure à trente jours. ».

Une exception existe cependant : » Toutefois, au cas où des poursuites disciplinaires ou judiciaires seraient engagées, elle peut être prolongée jusqu’à la décision définitive de la juridiction saisie  »

Le juge considère donc sur ce fondement que:

 « Une mesure interdisant l’accès aux enceintes et locaux d’une université à un étudiant édictée par le président de cette université dans le cadre des pouvoirs de police qu’il tient des dispositions de l’article R. 712-8 du code de l’éducation doit être adaptée, nécessaire et proportionnée au regard des seules nécessités de l’ordre public, telles qu’elles découlent des circonstances de temps et de lieu, et ne peut être prise que si les autorités universitaires ne disposent pas des moyens matériels de maintenir l’ordre dans l’établissement, et si les restrictions qu’elle apporte aux libertés sont justifiées par des risques avérés de désordre. »

Dans cette affaire, la mesure n’était pas limitée à 30 jours mais courrait « jusqu’à ce que la section disciplinaire du conseil académique de l’établissement ait statué ». Le juge considère que la durée était indéfinie et  donc potentiellement supérieure à trente jours alors que la procédure disciplinaire n’était pas encore engagé au moment où avait été pris la décision. La solution aurait été probablement différente si la mesure avait été prise après l’engagement de la procédure disciplinaire.

Le juge suspend donc en urgence la mesure afin de permettre à l’étudiant de passer ses examens.

Décision commentée : TA Caen, 13 déc. 2022, n° 2202719. 

Voir également: CAA Lyon, 6e ch. – formation à 5, 7 mai 2013, n° 12LY01435 ; CE, 4e et 5e ss-sect. réunies, 26 oct. 2005, n° 275512, Lebon.; TA La Réunion, 21 nov. 2013, n° 1100186 ; TA Lille, 10 juin 2014, n° 1200643.