Annulation de la fermeture d’un débit de boisson : il n’était pas établi que les auteurs des actes en cause aient été des clients de l’établissement

Le tribunal administratif d’Orléans a rendu une décision intéressante annulant un arrêté préfectoral de fermeture de 6 mois d’un débit de boisson pour erreur manifeste d’appréciation.

L’affaire portait sur un arrêté prononçant la fermeture administrative pour une durée de six mois du débit de boissons pris par la préfète d’Eure-et-Loir. L’arrêté s’était fondé sur plusieurs motifs, notamment l’ouverture tardive en dehors des horaires prévus par l’arrêté préfectoral, et des nuisances sonores émanant de l’établissement. En outre, le préfet s’appuyait sur sur l’existence d’actes criminels ou délictueux en relation directe avec les conditions d’exploitation et la fréquentation de l’établissement, constitués, d’une part, par des coups et blessures ainsi qu’un vol commis par des clients de l’établissement à l’encontre d’autres clients, d’autre part, par une rixe ayant entraîné des blessures, survenue devant l’établissement entre des personnes déclarant en sortir. C’était ce point qui était contesté devant le tribunal.

Le juge rappelle le pouvoir de police que détient le préfet pour fermeture un débit de boisson, en vertu de l’article ’article L. 3332-15 du code de la santé publique. S’agissant des faits reprochés, les requérants  contestaient que les actes délictueux soient en relation avec les conditions d’exploitation ou la fréquentation de l’établissement, et font notamment valoir qu’il n’est pas établi que les auteurs des actes en cause aient été des clients de l’établissement.

Le juge donne raison aux requérants en écartant un rapport de synthèse  rédigé par un agent – dont le nom et la qualité ne sont pas précisés – de la circonscription de sécurité publique de Dreux, qui donne, sous forme de tableau, des indications trop vagues. Le juge considère en effet que « le rapport, qui n’est pas suffisamment circonstancié, ne permet pas à lui seul d’établir que les faits délictueux commis seraient en relation avec la fréquentation de l’établissement ou ses conditions d’exploitation.  »

Le juge considère en conséquence que « à supposer que tous les faits mentionnés par l’arrêté du 28 décembre 2021 attaqué puissent être retenus, et alors même que l’établissement a précédemment fait l’objet d’un avertissement par arrêté du 5 mars 2020 ainsi que d’une fermeture pour une durée de quinze jours par arrêté du 9 octobre 2020, la préfète d’Eure-et-Loir, en décidant de fermer l’établissement pour une durée de six mois, durée la plus longue prévue par l’article L. 3332-15 du code de la santé publique, a, dans les circonstances de l’espèce, entaché son appréciation d’une erreur manifeste.

La décision de fermeture est donc annulée.

TA Orléans, 3e ch., 1er juillet 2022, n° 2104688