Le tribunal administratif a rendu une décision intéressante sur la possibilité de faire annuler une suspension à titre conservatoire dans le cadre d’une procédure disciplinaire en cours. L’affaire portait sur une suspension prise à l’égard d’un maitre de conférence à qui il était fait grief d’avoir divulgué à l’ensemble des étudiants de première année de licence de droit, quelques jours avant l’épreuve, le sujet de relations internationales et, à l’un d’entre eux, celui de droit constitutionnel. D’autres griefs, notamment des propos sexistes, non jugées par le tribunal avaient également du jouer dans cette affaire.
Le cadre juridique est fixé à l’article L. 951-4 du code de l’éducation selon lequel « Le ministre chargé de l’enseignement supérieur peut prononcer la suspension d’un membre du personnel de l’enseignement supérieur pour un temps qui n’excède pas un an, sans privation de traitement ».
Le juge administratif rappelle que:
« La suspension d’un professeur des universités sur le fondement de ces dispositions revêt un caractère conservatoire et vise à préserver l’intérêt du service public universitaire. Elle ne peut être prononcée que lorsque les faits imputés à l’intéressé présentent un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité et que la poursuite des activités de l’intéressé au sein de l’établissement présente des inconvénients suffisamment sérieux pour le service ou pour le déroulement des procédures en cours. Si l’autorité hiérarchique dispose à cet égard d’un large pouvoir d’appréciation, le principe et la durée de la suspension ne doivent pas être manifestement excessifs au regard de l’ensemble des circonstances de l’espèce. »
Or, le juge considère comme non établi le reproche de communication du sujet de droit constitutionnel à un étudiant. Le seul élément était en effet un message de l’étudiant sur son compte instagram dévoilant le sujet sans allusion à une quelconque communication du sujet par l’enseignant. Le juge considère comme non fautif la communication à l’ensemble des étudiants le sujet de l’épreuve de relations internationales. Il s’agissait en effet d’une épreuve à faire à domicile et ce n’était donc selon le tribunal qu’une modalité particulière de contrôle des connaissances relevant de la liberté pédagogique de l’enseignant.
Il résulte de tout ce qui précède que l’enseignant est fondé selon le tribunal, à demander l’annulation des décisions des 22 mai et 8 juin 2020 prononçant sa suspension.
TA Nancy, 22 septembre 2022, n° 2103727. Voir également sur le même sujet : CE, 18 juillet 2018, n° 418844 ; CE, 28 juin 2019, n° 422464 ; CE, 1er juin 2022, n° 458362.