Le Conseil d’Etat a rendu une très intéressante décision sur l’application du principe de sécurité juridique, qui reste trop rarement mis en œuvre par le juge administratif, notamment dans les hypothèses où des règles relatives à des études ou à des examens sont changées en cours d’année scolaire ou universitaire.
L’affaire portait sur la légalité du décret du 20 octobre 2020 relatif aux conditions de certification des candidats à l’examen du baccalauréat professionnel et portant suppression du brevet d’études professionnelle. Ce dernier modifiait les règles applicables au brevet d’études professionnelle au 1er janvier 2021, soit en plein milieu de l’année scolaire 2020-2021, ce qui avait des conséquences graves pour les élèves déjà inscrits en seconde et première professionnelle.
Le Conseil d’Etat s’appuie sur le principe de sécurité juridique, repris à l’article L. 221-5 du code des relations entre le public et l’administration. Selon ce dernier, le pouvoir règlementaire ne peut édicter une règle sans prendre une mesure transitoire si cette application immédiate est impossible ou qu’elle entraîne, au regard de l’objet et des effets de ses dispositions, une atteinte excessive aux intérêts publics ou privés en cause »
Dans cette affaire, le juge administratif constate que :
« Or l’entrée en vigueur de ces dispositions au milieu de l’année scolaire 2020-2021 a pour effet de priver les élèves scolarisés au titre de cette année scolaire en classes de seconde et de première professionnelles dans un établissement public local d’enseignement ou dans un établissement privé B… contrat, ainsi que ceux préparant le baccalauréat professionnel par la voie de l’apprentissage, de la possibilité de se présenter au certificat d’aptitude professionnelle correspondant à la spécialité du baccalauréat professionnel postulé ou relevant du même champ professionnel et les autorisant, le cas échéant, à exercer une activité réglementée, alors même que leur inscription dans ces classes ou dans ces formations au début de l’année scolaire en cours leur en ouvrait la possibilité. »
Par suite, le juge considère que « les dispositions attaquées, en tant qu’elles s’appliquent à ces élèves, ont été édictées en méconnaissance des dispositions précitées de l’article L. 221-5 du code des relations entre le public et l’administration ».
En conséquence, le Conseil d’Etat annule « l’article 2 du décret du 20 octobre 2020 en tant qu’elles s’appliquent aux élèves scolarisés au titre de l’année scolaire 2020-2021 en classes de seconde et de première professionnelles dans un établissement public local d’enseignement ou dans un établissement privé B… contrat, ou pour les élèves en formation en vue de préparer un baccalauréat professionnel par la voie de l’apprentissage en 2020-2021, ayant vocation à passer, dans le cadre de cette formation, le certificat d’aptitude professionnelle en 2020-2021 ou en 2021-2022″.
Référence: Conseil d’Etat, 4 février 2022, n° 448017