A quelle condition peut on considérer qu’une autorisation implicite a été rendue par l’administration ? Le Conseil d’Etat répond à cette question à propos du mécanisme de cumul d’enseignements des enseignants-chercheurs, mais la portée de la réponse est plus générale – a minima sur le cumul d’activité mais au delà sur le principe même d’autorisation tacite.
Le CNESER qui intervient en appel des sanctions prononcées par les universités, avait relaxé l’enseignant-chercheur en considérant que l’Université ne pouvait ignorer l’étendue de ses activités accessoires. Cette relaxe avait été annulée par le Conseil d’Etat pour dénaturation des faits, suite à quoi l’affaire avait été renvoyée devant le CNESER. Ce dernier avait à nouveau relaxé l’enseignant-chercheur en considérant que l’Université l’avait tacitement autorisé à cumuler ses activités d’enseignement à l’université avec un enseignement dispensés auprès d’écoles privées. La situation était en effet délicate puisque l’université avait bénéficié des liens entretenus par l’enseignant avec les deux écoles, ce qui rendait la sanction prise à l’égard de l’enseignement moralement discutable.
Le juge administratif censure cependant à nouveau le CNESER en rappelant la rigueur du droit. Dura lex sed lex : le Conseil d’Etat refuse de reconnaître une telle autorisation implicite dès lors que l’enseignant n’avait jamais fait de demande écrite en ce sens. Pas de demande : pas d’autorisation implicite :
« Si une autorisation implicite de cumul d’activités peut naître du silence gardé par cette autorité, c’est à la condition qu’une demande écrite, comprenant au moins l’identité de l’employeur ou la nature de l’organisme pour le compte duquel s’exercera l’activité envisagée, ainsi que la nature, la durée, la périodicité et les conditions de rémunération de cette activité et toute autre information de nature à éclairer l’autorité, lui ait été transmise ».
Autrement dit, une situation même notoire et acceptée par l’université ne peut faire naître une autorisation implicite. Le Conseil d’Etat fait cependant preuve de clémence en ce qu’il réduit la durée d’interdiction d’exercer toute fonction de recherche dans tout établissement public d’enseignement supérieur à une période d’un an assortie de la privation de la moitié du traitement.
Une décision qui devrait inciter les enseignants-chercheurs et au delà les fonctionnaires à la plus grande prudence en cas de cumul d’activité ou de cumul d’enseignement non demandé.
Conseil d’Etat, 2 mars 2022, n° 432959