Annulation du licenciement d’une enseignante pour insuffisante professionnelle

A quelle condition une administration peut elle licencier un agent pour insuffisance professionnelle?

Le cadre juridique est défini en ces termes:

 » Le licenciement pour inaptitude professionnelle d’un agent public ne peut être fondé que sur des éléments révélant l’inaptitude de l’agent à exercer normalement les fonctions pour lesquelles il a été engagé ou correspondant à son grade et non sur une carence ponctuelle dans l’exercice de ses fonctions.

Toutefois, une telle mesure ne saurait être subordonnée à ce que l’insuffisance professionnelle ait été constatée à plusieurs reprises au cours de la carrière de l’agent ni qu’elle ait persisté après qu’il a été invité à remédier aux insuffisances constatées.

Par suite, une évaluation portant sur la manière dont l’agent a exercé ses fonctions durant une période suffisante et révélant son inaptitude à un exercice normal de ses fonctions est de nature à justifier légalement son licenciement. »

 

Dans cette affaire, les évaluations professionnelles de l’enseignante avaient pointé ses carences dans la gestion de ses classes. Il lui était notamment reproché de ne pas parvenir à s’imposer vis à vis de ses élèves. Les inspections réalisées en 2011, 2013 et 2014 par le même inspecteur avaient confirmé les difficultés de l’enseignante à maintenir le calme dans ses classes et à asseoir son autorité.

Mais cela n’est pas suffisant pour justifier le licenciement au regard d’autres éléments pris en compte par le juge:

  • « ses évaluations annuelles professionnelles au titre des années 2003 à 2010, alors qu’elle était affectée dans un lycée général et technologique n’ont révélé aucun problème spécifique ».
  •  « l’intéressée, au même titre d’ailleurs que ses collègues, était alors confrontée à des élèves perturbateurs, remettant en cause l’autorité de leurs professeurs, et peu motivés par les enseignements qui leur étaient dispensés en italien. « 
  • les punitions qu’elle infligeait à ses élèves ou les mesures disciplinaires qu’elle tentait de mettre en place n’étaient pas soutenues par les chefs d’établissements, ce qui fragilisait son autorité vis-à-vis des élèves.
  • l’enseignante dispensait simultanément des cours dans d’autres établissements, et qu’elle avait donné satisfaction dans ces derniers.
  • toutes les inspections défavorables ont été réalisées par le même inspecteur et que le rectorat aurait pu faire procéder à aucune inspection par un inspecteur général (en l’absence d’autre inspecteur spécialisé en italien).

Le juge relève enfin que les membres de la commission administrative paritaire académique se sont prononcés, par 18 voix, contre le licenciement pour insuffisance professionnelle de la requérante.

Le juge censure donc la décision de licenciement comme entachée d’une erreur d’appréciation.

CAA Nantes, 6e ch., 4 juillet 2023, n° 22NT01179.