Dans un jugement important le tribunal administratif de Paris a condamné l’Etat pour faute en raison de la pollution de l’air et des effets en résultant sur la santé des requérants.
La reconnaissance de la faute de l’Etat en raison de sa carence en matière de lutte contre la pollution de l’air n’est pas nouvelle (voir par exemple TA Paris 4 juillet 2019 n° 1814405).
Mais l’intérêt de la décision réside dans la reconnaissance d’un lien de causalité entre cette faute et le préjudice subi par les requérants/
Le juge fixe le mode d’emploi de cette reconnaissance de lien de causalité, qui repose sur des probabilités:
« Il appartient à la juridiction saisie d’un litige individuel portant sur les conséquences pour la personne concernée d’une exposition à des pics de pollution résultant de la faute de l’Etat, de rechercher, au vu du dernier état des connaissances scientifiques en débat devant elle, s’il n’y a aucune probabilité qu’un tel lien existe.
Dans l’hypothèse inverse, elle doit procéder à l’examen des circonstances de l’espèce et ne retenir l’existence d’un lien de causalité entre l’exposition aux pics de pollution subie par l’intéressée et les symptômes qu’elle a ressentis que si ceux-ci sont apparus dans un délai normal pour ce type d’affection, et, par ailleurs, s’il ne ressort pas du dossier que ces symptômes peuvent être regardés comme résultant d’une autre cause que l’exposition aux pics de pollution. »
Le juge retient s’agissant du lien de qualité qu’« À plusieurs reprises, les symptômes manifestés par [les enfants] ont coïncidé avec des épisodes de pollution à dépassement de seuil. (…) Une amélioration nette de l’état de santé [des enfants] a été observée postérieurement à [leur] déménagement, puisqu’aucun épisode de gêne respiratoire sifflante n’a été ensuite enregistré (…) ».
Le tribunal administratif conclut donc à un lien de causalité clair entre ces problèmes de santé et la pollution de l’air :
« Il résulte, ainsi, de l’instruction qu’une partie des symptômes dont [ont] souffert [les enfants] a été causée par le dépassement des seuils de pollution résultant de la faute de l’État ».
Le tribunal administratif condamne l’Etat à indemniser comme préjudice, les souffrances endurées en raison des crise d’asthme et de bronchiolite, le recours au séance de kiné respiratoire. Il indemnise également le trouble dans les conditions d’existence, au regard des conséquences sur la vie familiale. Les montants des préjudices retenus sont faibles.
En revanche, le préjudice d’agrément, le préjudice d’angoisse, le préjudice tiré des conséquences de la pathologie sur la situation professionnelle, le préjudice moral d’angoisse et celui d’anxiété sont rejetés par la juridiction.
TA Paris, 16 juin 2023 n°2019925 et n°2019924
Voir également Conseil d’État, 17 octobre 2022 n° 428409, CE 12 juillet 2017 n° 394254 et CE 10 juillet 2020 n°428409.