Sanctions et régime applicables aux allégations de neutralité carbone dans la publicité

Le gouvernement a publié deux textes visant à sanctionner le « greenwashing ».

Il s’agit du décret n° 2022-538 du 13 avril 2022 définissant le régime de sanctions applicables en cas de méconnaissance des dispositions relatives aux allégations de neutralité carbone dans la publicité et du décret n° 2022-539 du 13 avril 2022 relatif à la compensation carbone et aux allégations de neutralité carbone dans la publicité. Ces derniers sont pris en application de la loi la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 dite Climat et résilience.

Le premier décret définissant le régime de sanctions applicables en cas de méconnaissance des dispositions relatives aux allégations de neutralité carbone dans la publicité ajoute un article R. 229-110 au code de l’environnement.

Ce dernier prévoit qu’en application de l’article L. 229-69, le ministre chargé de l’environnement peut sanctionner le non-respect de l’interdiction et le manquement aux obligations prévues à l’article L. 229-68 dans les conditions définies au présent article.

La procédure prévoit le respect du principe de contradictoire avec mise en demeure préalable:

« Après avoir envoyé un courrier à l’annonceur lui précisant qu’il dispose d’un délai d’un mois à compter de la réception de ce courrier pour présenter par écrit ses observations sur les griefs formulés à son encontre, le ministre chargé de l’environnement peut le mettre en demeure de se conformer à ces obligations dans un délai qu’il détermine. Il peut rendre publique cette mise en demeure. »

Si l’annonceur ne se conforme pas à cette mise en demeure dans le délai déterminé, le ministre chargé de l’environnement ordonne le paiement de l’amende prévue à l’article L. 229-69. Selon cet article l’amende est de 20 000 € pour une personne physique et de 100 000 € pour une personne morale, ces montants pouvant être portés jusqu’à la totalité du montant des dépenses consacrées à l’opération illégale.

 

Le second décret n° 2022-539 du 13 avril 2022 relatif à la compensation carbone et aux allégations de neutralité carbone dans la publicité ajoute une série d’articles dans le code de l’environnement.

L’article D. 229-106 du code de l’environnement prévoit le champ d’application des règles relatives aux allégations de neutralité carbone, tant sur le contenu de l’allégation que sur le support:

« L’annonceur qui affirme dans une publicité qu’un produit ou un service est “neutre en carbone”, “zéro carbone”, “avec une empreinte carbone nulle”, “climatiquement neutre”, “intégralement compensé”, “100 % compensé” ou emploie toute formulation de signification ou de portée équivalente respecte les dispositions de la présente section.

Cette section est applicable à la correspondance publicitaire et aux imprimés publicitaires, à l’affichage publicitaire, aux publicités figurant dans les publications de presse, aux publicités diffusées au cinéma, aux publicités émises par les services de télévision ou de radiodiffusion et par voie de services de communication en ligne, ainsi qu’aux allégations apposées sur les emballages des produits. »

L’article  D. 229-107 du code de l’environnement impose à cet annonceur de fournir un bilan des des émissions de gaz à effet de serre du produit ou service concerné couvrant l’ensemble de son cycle de vie, mis à jour annuellement. Il est précisé que le bilan est réalisé conformément aux exigences de la norme NF EN ISO 14067, ou tout autre standard équivalent avec les exigences de cette norme.

L’article D. 229-108 du code de l’environnement prévoit que l’annonceur faisant état d’allégation de neutralité carbone doit publier  » sur son site de communication au public en ligne, ou à défaut sur son application mobile, un rapport de synthèse décrivant l’empreinte carbone du produit ou service dont il est fait la publicité et la démarche grâce à laquelle ces émissions de gaz à effet de serre sont prioritairement évitées, puis réduites, et enfin compensées.  »

Le contenu du rapport est détaillé, avec notamment trois annexes:

« 1° Une annexe présentant le résultat du bilan prévu à l’article D. 229-107, ainsi qu’une synthèse de la méthodologie d’établissement de ce bilan. Cette synthèse précise notamment le périmètre retenu pour la définition du produit ou service concerné, les unités fonctionnelles ou déclarées utilisées, les frontières du système considéré, les modalités du traitement de l’étape d’utilisation et de fin de vie, les données d’émissions prises en compte pour l’électricité ou le gaz consommés provenant des réseaux. Elle précise le ou les pays ou zones géographiques dans lesquels ont lieu les émissions, et les émissions dues au transport international, dans la mesure où ces données sont disponibles ;
2° Une annexe établissant la trajectoire visée de réduction des émissions de gaz à effet de serre associées au produit ou au service dont il est fait la publicité, avec des objectifs de progrès annuels quantifiés, couvrant au moins les dix années suivant la publication du rapport au titre de cette section. Une trajectoire actualisée couvrant une nouvelle période de 10 ans est établie tous les 5 ans suivants la publication du premier rapport au titre de cette section ;
3° Une annexe détaillant les modalités de compensation des émissions résiduelles, qui précise notamment la nature et la description des projets de compensation. Cette annexe présente également des informations sur leur coût, en les classant selon les catégories suivantes : en-dessous de 10€/tCO2, entre 10 et 40€/tCO2 ou au-dessus de 40€/tCO2. Cette annexe démontre que le volume des émissions réduites ou séquestrées via cette compensation correspond aux émissions résiduelles de l’ensemble des produits ou services vendus et concernés par la publicité. Cette annexe précise également les modalités mises en œuvre par l’annonceur afin de s’assurer qu’elle ne procède pas à un double-comptage de la compensation permise par ces projets. En particulier, elle présente les modalités du retrait des réductions et séquestrations d’émissions du marché lorsqu’il est fait recours à des crédits de compensation. Enfin, cette annexe détaille les efforts mis en œuvre pour assurer la meilleure cohérence possible entre les zones géographiques dans lesquelles les projets sont réalisés et où ont lieu les émissions.

Il est prévu que la  publication doit être tenue à jour annuellement, pendant toute la durée de commercialisation du produit ou du service pendant laquelle l’annonceur affirme dans une publicité que ce même produit ou service est neutre en carbone ou emploie toute formulation de signification ou de portée équivalente.

La mise à jour permet notamment d’assurer le suivi de l’évolution des émissions associées au produit ou service en comparaison avec la trajectoire de réduction mentionnée précédemment. Ainsi l’annonceur retire l’affirmation mentionnée à l’article D. 229-106 s’il apparaît que les émissions unitaires associées au produit ou service avant compensation ont augmenté entre deux années successives.

Enfin, l’article précise que le lien internet ou code à réponse rapide permettant d’accéder à cette publication est indiqué sur la publicité ou l’emballage portant l’allégation de neutralité carbone.

L’article  D. 229-109 du code de l’environnement régit les projets de compensation. Il prévoit que les réductions et séquestrations d’émissions issues de projets de compensation utilisés par l’annonceur respectent les principes définis par l’article L. 229-55 et ses textes d’application.

Les projets de compensation ne doivent pas être défavorables à la préservation et la restauration des écosystèmes naturels et de leurs fonctionnalités.

Les réductions d’émissions reconnues dans le cadre du décret n° 2018-1043 du 28 novembre 2018 créant un label “Bas Carbone” sont réputées respecter les deux alinéas précédents. Les annonceurs ne peuvent afficher la mention “Compensation réalisée en France”, ou toute mention de signification ou de portée équivalente, que si la totalité des projets de compensation sont réalisés en France.