Coronavirus : Ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020 : adaptation des règles des contrats soumis au code de la commande publique

L’ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020 relative aux contrats soumis au Code de la commande publique et autres contrats publics pendant la crise sanitaire née de l’épidémie de Covid-19 (coronavirus) a été publiée.

L’ordonnance publiée au Journal officiel du 26 mars 2020 comprend de nombreuses mesures essentielles pour tous les praticiens du droit des marchés publics et plus largement des contrats publics.

1.Champ d’application : tous les contrats publics

Il est prévu comme attendu que les dispositions s’appliquent aux contrats soumis au code de la commande publique ainsi qu’aux contrats publics qui n’en relèvent pas: marchés publics, concessions, conventions d’occupation du domaine public etc.

Sur le champ d’application temporel, les dispositions de l’ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020 s’appliquent aux contrats en cours au 12 mars  2020 ou à ceux conclus postérieurement à cette date et jusqu’à deux mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire déclaré par l’article 4 de la loi du 23 mars 2020 susvisée, augmentée d’une durée de deux mois

Il est précisé que les mesures « ne sont mises en œuvre que dans la mesure où elles sont nécessaires pour faire face aux conséquences, dans la passation et l’exécution de ces contrats, de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation« .

2.Passation des marchés publics et autres contrats publics

2.1Aménagement de délais de passation

Un aménagement des délais est prévu pour les contrats soumis au code de la commande publique. Il est prévu sauf lorsque les prestations objet du contrat ne peuvent souffrir aucun retard, que les délais de réception des candidatures et des offres dans les procédures en cours sont prolongés d’une durée suffisante. Cette durée est fixée au cas par cas par l’autorité contractante, pour permettre aux opérateurs économiques de présenter leur candidature ou de soumissionner.

2.2 Aménagement de la mise en concurrence

L’ordonnance n° 2020-319 prévoit un aménagement des modalités de mise en concurrence lors que cela est nécessaire. Ainsi lorsque les modalités de la mise en concurrence prévues en application du code de la commande publique dans les documents de la consultation des entreprises ne peuvent être respectées par l’autorité contractante, celle-ci peut les aménager en cours de procédure.

Il est prévu comme seul garde fou que cela doit se faire « dans le respect du principe d’égalité de traitement des candidats ».

2.3 Prolongation des marchés publics et autres contrats publics

Afin d’éviter le risque de contrats arrivant à terme non renouvelés, il est prévu un aménagement à la possibilité de conclure des avenants de prolongations, aujourd’hui strictement encadrés par le code de la commande publique.

Il est ainsi prévu une possibilité de prolongation « au-delà de la durée prévue par le contrat lorsque l’organisation d’une procédure de mise en concurrence ne peut être mise en œuvre. »

S’agissant des accords cadre il est prévu que « cette prolongation peut s’étendre au-delà de la durée mentionnée aux articles L. 2125-1 et L. 2325-1 du code de la commande publique. » Pour rappel, il s’agit de quatre ans pour les pouvoirs adjudicateurs, huit ans pour les entités adjudicatrices, et sept ans pour les marchés de défense et de sécurité.

Cependant, dans tous les cas, la durée de cette prolongation ne pourra excéder celle de la période prévue à l’article premier, augmentée de la durée nécessaire à la remise en concurrence à l’issue de son expiration.

3.Exécution des marchés publics  / contrats publics

3.1 Avances

Il est prévu afin de soutenir les entreprises, d’augmenter le taux de versement de l’avance, par avenant sans exiger la constitution d’une garantie à première demande.

L’ordonnance n° 2020-319 dispose ainsi: « [le taux de l’avance] peut être porté à un montant supérieur à 60 % du montant du marché ou du bon de commande. Ils ne sont pas tenus d’exiger la constitution d’une garantie à première demande pour les avances supérieures à 30 % du montant du marché.»

Rappel: Aujourd’hui, le taux de l’avance est plafonné à 30% et ne peut être étendu au delà, il peut l’être jusqu’à 60% que si le titulaire constitue une garantie à première demande (articles  R.2191-7 et R.2191-8 du code de la commande publique).

3.2 Disposition en cas de difficultés d’exécution du contrat

Il est prévu par l’ordonnance des règles dérogatoires applicables « En cas de difficultés d’exécution du contrat » qui s’appliqueront même en cas de stipulation contraire. En revanche, les stipulations plus favorables au titulaire du contrat priment et ne sont pas remplacées par les règles exposées ci-après.

S’agissant des délais d’exécution:

Il est prévu une prolongation des délais d’exécution si ces derniers ne peuvent pas être respectés:

« 1° Lorsque le titulaire ne peut pas respecter le délai d’exécution d’une ou plusieurs obligations du contrat ou que cette exécution en temps et en heure nécessiterait des moyens dont la mobilisation ferait peser sur le titulaire une charge manifestement excessive, ce délai est prolongé d’une durée au moins équivalente à celle mentionnée à l’article 1er, sur la demande du titulaire avant l’expiration du délai contractuel ; »

S’agissant des sanctions des pénalités:

– « 2° «Lorsque le titulaire est dans l’impossibilité d’exécuter tout ou partie d’un bon de commande ou d’un contrat, notamment lorsqu’il démontre qu’il ne dispose pas des moyens suffisants ou que leur mobilisation ferait peser sur lui une charge manifestement excessive :

a) Le titulaire ne peut pas être sanctionné, ni se voir appliquer les pénalités contractuelles, ni voir sa responsabilité contractuelle engagée pour ce motif ;
b) L’acheteur peut conclure un marché de substitution avec un tiers pour satisfaire ceux de ses besoins qui ne peuvent souffrir aucun retard, nonobstant toute clause d’exclusivité et sans que le titulaire du marché initial ne puisse engager, pour ce motif, la responsabilité contractuelle de l’acheteur ; l’exécution du marché de substitution ne peut être effectuée aux frais et risques de ce titulaire ;»
Les hypothèses d’indemnisation du titulaire du marché sont prévues:

 «3° Lorsque l’annulation d’un bon de commande ou la résiliation du marché par l’acheteur est la conséquence des mesures prises par les autorités administratives compétentes dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, le titulaire peut être indemnisé, par l’acheteur, des dépenses engagées lorsqu’elles sont directement imputables à l’exécution d’un bon de commande annulé ou d’un marché résilié ;

Suspension d’un marché public

L’ordonnance organise les conséquences de la suspension d’un marché public à prix forfaitaire.

Il est notamment prévu que ce dernier paie ce qui est du après la suspension du contrat, afin d’éviter les problèmes de trésorerie des titulaires: « Lorsque l’acheteur est conduit à suspendre un marché à prix forfaitaire dont l’exécution est en cours, il procède sans délai au règlement du marché selon les modalités et pour les montants prévus par le contrat. »

Il est également prévu les modalités de reprise post suspension: repris à l’identique, modification par avenant ou résiliation:

« à l’issue de la suspension, un avenant détermine les modifications du contrat éventuellement nécessaires, sa reprise à l’identique ou sa résiliation ainsi que les sommes dues au titulaire ou, le cas échéant, les sommes dues par ce dernier à l’acheteur ;»

 Lire en intégralité : Ordonnance n° 2020-319 portant diverses mesures d’adaptation des règles de passation, de procédure ou d’exécution des contrats soumis au code de la commande publique